Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/628

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dire, pour reconnoiſtre la confiance que vous avez en ma diſcretion, eſt de vous aſſurer que le Prince Spitridate ne s’eſt trompé qu’au nom, lors qu’il vous a parlé de l’affection que voſtre rare merite a fait naiſtre dans mon cœur : eſtant certain que l’amitié que j’ay pour vous eſt auſſi parfaite, que ſon amour eſt confiance. Je m’aſſure Madame, que vous ne vous offencerez pas de ce que je dis, & que vous voudrez bien que je vous conjure de travailler a faire que Spitridate, de qui la vertu me ravit, me veüille regarder comme ſon Amy que je veux eſtre, & que je ſuis deſja : afin qu’en me juſtifiant, vous vous juſtifiyez auſſi. Mais en attendant que cela ſoit, je vous promets que malgré la haine qu’il me porte ſans doute, je ne laiſſeray pas de ſonger a luy redonner la liberté, auſſi toſt que les Dieux m’auront donné la joye d’avoir delivré la Princeſſe Mandane.

CYRUS.


Cette Lettre ayant donc eſté donnée à celuy qui avoit aporté celle de Spitridate, il fut conduit à cette Princeſſe : qui croyoit devoir eſtre bien eſclaircie par luy, de la fortune de ce Prince : Mais elle fut extraordinairement ſurpriſe, lors qu’elle vit qu’il ne sçavoit pas ſeulement que Spitridate fuſt priſonnier. Il luy dit bien qu’il y avoit environ un mois que l’on avoit amené de nuit des priſonniers à Heraclée, que l’on y gardoit tres exactement : mais que l’on ne diſoit point qui ils eſtoient. En ſuitte elle luy demanda ce que l’on diſoit de Spitridate ? & il luy reſpondit qu’on ne sçavoit ce qu’il eſtoit devenu : & que tout le Peuple le re