Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/184

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promettre que des Victoires & der Triomphes. Pendant que nous fusmes à Ephese, nous conversasmes avec beaucoup de Grecs, qui vinrent en ce lieu là, ou par curiosité, ou par devotion ; & entre les autres, Periandre Roy de Corinthe y vint inconnu, & logea en mesme lieu que nous ; ce qui lia une amitié assez estroite entre luy & moy, s’il m’est permis de parler ainsi d’un Souverain. Ce Sage Prince qui passe pour un des excellens Hommes de toute la Grece, eut tant d’inclination pour Artamene, qu’il me fit promettre, que nous passerions à Corinthe, si l’ordre de nos affaires, & la route que nous devions prendre nous le permettoit. Apres avoir donc visité toute la Carie ; & une partie de la Lydie, comme je l’ay desja dit, nous fusmes en la haute & basse Phrigie. Nous vismes en la premiere, la grande Ville d’Apamée ; & en l’autre le mont Ida, le Port de Tenedos, le Fleuve de Xanthe, & les déplorables ruines de Troye. Ce fut là qu’Artamene s’arresta avec beaucoup de plaisir ; & que se voyant aux mesmes lieux où le Vaillant Hector, & le redoutable Achille avoient combattu, il ne s’en pouvoit tirer ; & il passa des journées entieres, à regarder le Tombeau de ce dernier demi-Dieu. Mais comme depuis que nous estions entrez dans l’Jonie, nous avions toujours eu un homme de l’Isle de Samos, qui ayant fort voyagé, & estant fort sçavant aux choses de l’Antiquité, nous guidoit, & nous monstrroit tout ce qu’il y avoit de rare ; ce fut là qu’il pensa venir à bout de sa patience, en luy faisant cent questions & cent demandes, sur le Siege d’Ilium. Il y reste encore quelques ruines, de deux grands Chasteaux de Marbre, que les flames espargnerent, & que le Temps a jusques