Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/257

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es de vous, lors que je vous supplieray, comme je fais, de n’exposer plus une vie si precieuse à de si grands hazards. Vostre Majesté sçait, comme je luy ay desja dit, que le salut de ses Estats y est attaché : & que peut-estre Artamene ne seroit pas toujours assez heureux, pour la pouvoir secourir. Laissez donc seulement, Seigneur, à ce genereux Estranger, le soing de vaincre vos Ennemü : & ne l’occupez plus à deffendre la vie d’un Prince, à laquelle est inseparablement attachée celle de

MANDANE.

Artamene ayant rendu cette Lettre au Roy, en fut admirablement bien reçeu : mais Philidaspe, qui l’entendit lire, ne fut pas celuy de toute l’assemblée, qui tesmoigna y prendre le plus de plaisir : & l’on vit un chagrin sur son visage, qui marquoit visiblement, le trouble & l’émotion de son cœur. A quelques jours de là, les blessures de mon Maistre estant entierement gueries, & voulant commencer de mettre en exercice le Corps qu’on luy avoit donné à commander ; comme les deux Armées estoient retranchées l’une devant l’autre, il fit plusieurs Parties, où il eut tousjours de l’avantage : & il enleva mesme un Quartier au Roy de Phrigie. Philidaspe sur aussi assez heureux, en de pareilles rencontres : Cependant, quoy que cette guerre fust effectivement faite par le Roy de Pont, à cause qu’on luy avoit refusé la Princesse de Capadoce ; neantmoins comme cette cause n’eust pas esté assez plausible aux yeux des Peuples, veû qu’il n’est rien qui doive estre si libre que les Mariages ; ny rien de plus juste, que l’authorité des