Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/299

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dont il n’avoit pas fort bonne opinion. Cependant les Juges s’eſtant levez, & s’eſtant aſſemblez pour examiner tout bas la choſe entre eux ; Philidaſpe qui avoit eſté preſent à tout ce qui venoit d’eſtre fait ; & qui eſtoit au deſespoir, de voir tous les jours acquerir une nouvelle gloire à Artamene ; s’approcha de Ciaxare, & le ſuplia de conſiderer, le peu de temps qu’il y avoit, qu’Artamene avoit quitté le lict & la Chambre. Qu’ainſi s’il luy vouloit faire l’honneur de ſouffrir que ce fuſt luy qui combatiſt Artane, en cas que les Juges permiſſent ce ſecond combat ; il luy en ſeroit eternellement obligé. Philidaſpe ne put parler ſi bas, qu’Artamene qui l’obſervoit touſjours ſans sçavoir preciſément pourquoy, n’en entendiſt quelque choſe : ſi bien qu’ayant peur qu’il n’obtinſt ce qu’il demandoit, il s’approcha du Roy de Capadoce à ſon tour, avec beaucoup de reſpect ; & luy adreſſant la parole, Seigneur, luy dit il, n’eſcoutez pas la priere de Philidaſpe, puis qu’elle eſt également injurieuſe, & à ſa valeur, & à la mienne. Comment l’entendez vous ? reprit le jeune Inconnu ; l’entens, luy repliqua Artamene ; qu’un homme comme Philidaſpe, ne doit pas demander à combattre un laſche, ſans y eſtre forcé comme moy : & que c’eſt auſſi me faire un outrage, que de croire que j’aye beſoin de toutes mes forces, pour vaincre un pareil Ennemy. Quand Artane ſeroit Artamene, repliqua bruſquement Philidaſpe, je demanderois ce que je demande ; & quand Artane ſeroit Philidaſpe, repliqua mon Maiſtre, je ne cederois pas ma place à un autre. Ciaxare voyant que cette conteſtation pouvoit aller trop avant, les embraſſa ; & loüant leur zele & leur courage, les fit embraſſer eux meſmes à l’inſtant. Ce Prince dit à Philidaſpe, qu’il n’eſtoit