Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/385

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n’aime pas tant à vous rencontrer chez le Roy, chez la Princesse ou dans les Bataille, lors que je suis prest de faire des Rois prisonniers. Pour moy, repliqua Artamene, je n’ay pas tant d’aversion à vous rencontrer : & je voudrois bien vous avoir trouvé à la teste d’un armée ennemie, pour vous disputer la victoire : & pour vous apprendre, de quelle façon il faut faire des prisonniers, pour les faire glorieusement. Il n’est pas besoing, respondit Phidaspe, d’un Armée de cinquante mille hommes, pour vous faire avoir le plaisir que vous desirez : & pour peu que vous en ayez d’envie, je vous la feray passer facilement. Il ne tiendra donc qu’à vous, reprit Artamene ; & pourveu que les pretentions que vous avez à la Cour ne vous empeschent pas de me satisfaire ; & ne vous obligent pas à vous repentir, de ce que vous venez de dire ; nous verrons demain au matin au Soleil levant, si la Princesse a raison, de desirer que Philidaspe aime Artamene, & qu’Artamene aime Philidaspe. Il le veux bien, respondit-il : mais de vostre costé, gardez que le respect que vous avez pour le Roy, & celuy que vous avez pour la Princesse, ne vous facent changer de resolution. C’est dequoy nous serons esclaircis demain au matin, repliqua Artamene, derriere le Temple de Mars, où je vous attendray avec une espée. Cependant, poursuivit il, je pense qu’il est bon de nous r’aprocher du Roy, afin que l’on ne descouvre rien de nostre dessein. Apres cela ils se r’aprocherent en effet : & se contraignirent si admirablement, que personne ne s’aperçeut de ce qui c’estoit passé entre eux. Moy mesme, qui comme je l’ay desja dit, avois remarqué quelque agitation sur le visage d’Artamene, & sur celuy de Philidaspe, y fus