Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/448

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bien qu’à moy : vous aurez du moins cét avantage, reprit Arbate, que vous aurez tousjours une personne fidelle aupres d’Amestris, qui destruira tous les desseins de vostre Rival : & qui avancera tous les vostres. Vous avez raison, reprit le trop credule Megabise ; mais mon Frere, adjousta-t’il, je vous ay veû une fois chez Amestris : ne seroit-ce point, que vous l’aimeriez un peu ? Quand je suis arrivé icy, reprit Arbate en sousriant, j’aimois trop vostre Rival : & à la fin de la conversation, il s’en faut peu que vous ne me croiyez amoureux de vostre Maistresse. Encore une fois Megabise, adjousta-t’il, voyez si vous voulez que je vous serve, ou si vous ne le voulez pas : car pour moy, vous m’obligerez fort, de me dispenser de faire une infidelité à mon Amy. Megabise voyant une si grande indifference dans l’esprit d’Arbate, se r’assura : & il ne soubçonna point en effet, qu’un homme qui tesmoignoit aimer tant Aglatidas, & l’aimer tant luy mesme ; peust jamais aimer Amestris. Tant y a Seigneur, qu’il le deçeut comme il m’avoit deçeu : Et qu’il se vit alors au point où il s’estoit tant desiré. Car enfin il m’assura qu’il avoit dit la chose dont nous estions convenus à son Frere : il me representa sa douleur & son desespoir : & me dit en suitte, que Megabise ne luy avoit pas voulu promettre de ne voir plus Amestris : mais qu’il luy avoit permis de la voir : & de tascher de s’en faire aimer. Luy jurant que s’il remarquoit que cette belle Fille le traitast mieux que luy, il s’en retireroit absolument : & le laisseroit en paisible possession de son bonheur. Or Seigneur, ce qu’Arbate me dit à moy, il le dit à Megabise : & luy persuada que j’aurois cette defference pour luy, de luy ceder Amestris, dés qu’il sembleroit estre assez