Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/52

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

grand, pour luy pouvoir estre jamais pardonné ; & qui de plus, avoit appris une chose, qu’Artamene ignoroit encore ; au lieu de luy respondre, s’eslança vers luy l’espée haute, & commença un combat au milieu des feux & des flames ; qui n’estoit pas moins redoutable, par ce qui tomboit d’enhaut, que pour les coups qui partoient de la main d’un Ennemy invincible ; que l’Amour, la Haine, & la Vangeance, rendoient encore plus vaillant qu’à l’accoustumée ; quoy qu’il fust toujours le plus vaillant homme du monde. Hidaspe, Artucas, Chrisante, Aglatidas, & Araspe ; se rangerent aupres d’Artamene : car pour Feraulas, ce fut luy qui eut ordre de faire continuer d’esteindre le feu. Ainsi le Roy d’Assirie voyoit tout à la fois, travailler à son falut & à sa perte ; vouloir sauver sa vie, & vaincre celuy qui l’avoit servi. Encore (disoit Artamene en luy mesme, & en jettant les yeux vers le haut de la Tour, où il voyoit tousjours son Rival) si ma Princesse regardoit ce que je fais pour la sauver, je serois bien moins malheureux : & si j’estois asseuré qu’elle vist ma mort, ou ma victoire, je n’aurois presque rien à desirer. Cependant la meslée se commence, & se continuë fort chaudement : & sans qu’Artamene cesse de fraper, il ne laisse pas d’avoir soin de voir si Feraulas fait bien executer ses ordres. Enfin dans cette confusion, il s’attache en un combat particulier contre Aribée, qui fut dangereux & opiniastré : car quoy que ce traistre eust en teste le plus redoutable des hommes, le desespoir faisoit en luy, ce que la valeur n’auroit pû faire en un autre. Neantmoins comme au contraire, Artamene combatoit alors avec espoir ; & qu’il estoit persuadé, qu’il n’y avoit plus que quelques murailles entre sa Princesse &