Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/453

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pour le deſſein qu’il avoit. Mazare eſtant donc aſſuré de cette Galere, ne douta plus qu’il ne peuſt aiſement enlever la Princeſſe : car il commandoit bien plus dans le Chaſteau que le Roy d’Aſſirie. Et comme ce Chaſteau eſt au bout du Port, il y a une Porte, comme vous sçavez, par laquelle il n’y avoit pas douze pas à faire, pour entrer dans la Galere de ce Capitaine qui eſtoit de l’intelligence : & cette Galere s’eſtoit trouvée par hazard de ce coſté là. Mais comme c’eſtoit un homme d’entrepriſe, & accouſtumé à la guerre ; il dit à Mazare que pour la ſeureté de ſon deſſein, & pour ſa vangeance particuliere de luy, & de tous ſes Compagnons, il faloit donner ordre que l’on miſt le feu aux Galeres & aux Vaiſſeaux qui devoient demeurer au Port, afin qu’on ne les peuſt ſuivre : & que ces nouveaux Capitaines ne joüiſſent pas long temps de leurs Charges : ou que du moins ils ne fuſſent pas en eſtat d’en faire les fonctions. Quoy que Mazare viſt que la choſe eſtoit bien penſée, & preſque neceſſaire pour ce qu’il avoit reſolu, il y eut pourtant de la repugnance : non pas à cauſe des Galeres & des Vaiſſeaux, où aparamment peu de monde periroit ; mais par la crainte de l’embrazement de la Ville. Toutefois ce Capitaine pour l’y obliger, prit la parole & luy dit, Seigneur, quand Sinope bruſlera, ce n’eſt qu’une Ville rebelle, qui merite le feu & le chaſtiment : & pour le Roy d’Aſſirie qui vous tient en peine, ce feu ſera eſteint devant qu’il puiſſe avoir gagné le Chaſteau. Enfin ce Capitaine dit tant de choſes, que Mazare y conſentit : & l’autre ſe chargea de l’execution de cette entrepriſe. Ce Prince dans l’intention qu’il avoit de taſcher de gagner le cœur de Mandane, fit deſſein de la mener en