Page:Segur - Les Deux Nigauds.djvu/409

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Quelques jours se passèrent dans les mêmes sentiments de bonheur ; la campagne apparaissait aux enfants sous un aspect nouveau et charmant. Ils ne comprenaient pas comment ils avaient pu désirer de quitter la vie tranquille, heureuse, utile, de la campagne, pour l’agitation, les ennuis, l’isolement de Paris. Ils faisaient de Paris, de la pension, de la tante Bonbeck, une peinture si affreuse, que M. et Mme Gargilier en riaient malgré eux. Prudence ne cessait de faire l’éloge des Polonais, surtout de Coz, et déclarait que sans lui ils eussent tous péri dix fois. Coz travaillait comme un nègre, se mettait à tout, était partout, faisait l’ouvrage de trois hommes ; jamais M. Gargilier n’avait eu un si excellent serviteur ; il ne tarda pas à le prendre définitivement à son service en qualité de surveillant, cocher, ouvrier, domestique, etc. Coz était plus heureux que tous les rois de la terre : il ne manquait à son bonheur que Boginski, dont il n’avait pas de nouvelles.

Un jour, le facteur apporta à M. Gargilier une lettre qu’il lut tout haut à sa femme et à ses enfants, moitié riant, moitié fâché :


« Mon frère,

« Vos enfants sont des nigauds, surtout Simplette, qui n’a pas voulu rester avec moi. Votre Prude est une sotte que vous devriez renvoyer et qui gâte vos