Page:Segur - Les Deux Nigauds.djvu/64

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dîner, elle sortit du wagon avec Innocent et Simplicie, escortée de ses deux gardes du corps, qui la firent placer à table. Ils allaient faire mine de se retirer, quand Prudence, effrayée du bruit et du mouvement, leur proposa de se mettre à fable avec eux et de les faire servir. Les Polonais se regardèrent d’un air triomphant et prirent place, l’un à la droite, l’autre à la gauche de leurs trois protégés et bienfaiteurs. Le service se fit rapidement ; Prudence et les enfants mangeaient et buvaient comme s’ils avaient la soirée devant eux ; mais les Polonais dévoraient avec rapidité ; ils connaissaient le prix du temps en chemin de fer.

Quand les employés crièrent : « En voiture, messieurs, en voiture ! » les Polonais avaient bu et mangé tout ce qu’ils avaient devant eux et tout ce qu’on leur avait servi. Prudence et les enfants commençaient leur rôti.

« Comment ! en voiture ! Mais nous n’avons pas fini. Dites donc, conducteur, attendez un peu ; laissez-nous finir, » dit Prudence alarmée.

La cloche sonna. « En voiture ! messieurs, » fut la seule réponse qu’elle reçut. Les Polonais se chargèrent du paiement avec la bourse de Prudence ; elle profita de ces courts instants pour remplir ses poches de poulet, de gâteaux, de pommes, et se laissa entraîner ensuite par les Polonais. Ils lui firent retrouver son wagon qu’elle avait perdu, et