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À LA VICOMTESSE ÉMILE DE PITRAY


Kermadio, 25 novembre 1863.



Chère petite, je suis bien contente que tu ailles mieux. En prenant la vie pour ce qu’elle est, une succession de jours pénibles, qui s’écoulent pour ne plus revenir, et qui mènent infailliblement à la mort de la matière (source de tout mal) pour arriver à la vie éternelle de l’âme, on trouve force et courage pour bien vivre et pratiquer la piété et le Renoncement de Gaston. Tu auras neuf mois pénibles, une couche plus ou moins douloureuse, une suite de couches très ennuyeuse ; une année ou dix-huit mois de premiers soins très astreignans, ensuite l’éducation des grands, suivie de celle des petits qui deviendront grands à leur tour ; vue de loin, cette perspective est effrayante ; vue de près, au jour le jour, elle offre mille consolations, mille compensations, même humainement parlant ; et pour l’âme, quelle récolte abondante de mérites, de réelles satisfactions ! Aucune peine, aucun ennui ne passent inaperçus; tout est récompensé, paroles douces, actions utiles, pensées charitables et chrétiennes, impatience réprimée, indolence surmontée, tout enfin porte ses fruits et prépare une auréole de gloire et de bonheur. – Si tu as une fille, appelle-la Christine. Je fais une Christine charmante dans mon Petit Bossu ; et il n’y a pas de danger qu’on te rapproche de la mère de Christine qui est Mme ***. Je