Page:Senancourt Obermann 1863.djvu/327

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distingue des planches sur la mer encore menaçante ; les filles des guerriers ne sont plus. Les vents se taisent, tout est calme ; on entend des voix humaines au-dessus des rochers, et des gouttes froides tombent du toit. Le Calédonien s’arme, il part dans la nuit, il franchit les monts et les torrents, il court à Fingal ; il lui dit : Slisama est morte ; mais je l’ai entendue ; elle ne nous quittera pas, elle a nommé tes amis, elle nous a commandé de vaincre.

C’est au Nord que semblent appartenir l’héroïsme de l’enthousiasme et les songes gigantesques d’une mélancolie sublime[1]. A la Torride appartiennent les conceptions austères, les rêveries mystiques, les dogmes impénétrables, les sciences secrètes, magiques, cabalistiques, et les passions opiniâtres des solitaires.

Le mélange des peuples et la complication des causes, ou relatives au climat, ou étrangères à lui, qui modifient le tempérament de l’homme, ont fourni des raisons spécieuses contre la grande influence des climats. Il semble d’ailleurs que l’on n’ait fait qu’entrevoir et les moyens et les effets de cette influence. On n’a considéré que le plus ou moins de chaleur ; et cette cause, loin d’être unique, n’est peut-être pas la principale.

Si même il était possible que la somme annuelle de la chaleur fût la même en Norvège et dans l’Hedjas, la différence resterait encore très-grande, et presque aussi grande entre l’Arabe et le Norvégien. L’un ne connaît qu’une nature constante, l’égalité des jours, la continuité de la saison, et la brûlante uniformité d’une terre aride. L’autre, après une longue saison de brumes ténébreuses où la terre est glacée, les eaux immobiles, et le ciel bouleversé par les vents, verra une saison nouvelle éclairer

  1. Encore un aperçu vague. Cette observation serait même inutile ici ; mais elle ne l’est pas en général, et pour les autres passages auxquels elle peut se trouver applicable.