Page:Servières - Tannhæuser à l’Opéra en 1861, 1895.djvu/57

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 53 —

Figurez-vous un amoncellement d’énormes rochers aux formes bizarres et fantastiques qui donnent le frisson. Les parois de cet entonnoir surnaturel sont en granit rouge. Çà et là, pendent des stalactites roides comme des tuyaux d’orgue, aux arêtes brillantes de reflets aurifères. Ailleurs, des cristallisations s’épanouissent commedes végétaux monstrueux qu’aurait pétrifiés une cascade furieuse qui bondit à travers les anfractuosités et se précipite dans le vide. À gauche, l’œil s’égare dans les profondeurs inférieures d’antres souterrains baignés d’une atmosphère bleue comme celle de la Grotte d’Azur. Des voûtes, tombe un nombre infini de colonnes naturelles qui plongent dans une eau claire où nagent des sirènes. Au premier plan, est le trône de la divinité, formé de conques de nacre étincelante et de fleurs brillantes comme le diamant, rouges comme le sang, fleurs anonymes de toutes les botaniques.


En cette description, tous ceux qui ont vu Tannhæuser à Bayreuth ou à Munich ont reconnu le décor dans lequel leur est apparue la Vénus légendaire de Wagner.

« La grotte de Vénus est une féerie, écrivait Paul de Saint-Victor[1] ; le paysage printanier de la Wartburg est d’une fraicheur idéale ; on dirait le fond d’un tableau d’Hemling démesurément agrandi. La chasse du Landgrave, avec ses piqueurs, ses sonneries d’oliphant, sa meute tenue

  1. Presse du 18 mars 1861.