Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1862, tome 5.djvu/456

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permis de parler, je vous parlerai franchement. Vous craignez Antiochus, et vous n’avez pas tort ; on peut craindre un tyran qui, soit par une guerre ouverte ou une trahison cachée, attentera à votre vie. C’est pourquoi, seigneur, voyagez pendant quelque temps, jusqu’à ce que sa rage et sa colère soient oubliées, ou que le destin ait tranché le fil de ses jours. Laissez-nous vos ordres : si vous m’en donnez, le jour ne sert pas plus fidèlement la lumière que je vous servirai.

Périclès : Je ne doute pas de ta foi ; mais s’il voulait empiéter sur mes droits en mon absence ?

Hélicanus : Nous verserons notre sang sur la terre qui nous donna naissance.

Périclès : Tyr, adieu donc ; et je me rends à Tharse, j’y recevrai de tes nouvelles et je me conduirai d’après tes lettres. Je te confie le soin que j’ai toujours eu et que j’ai encore de mes sujets : ta sagesse est assez puissante pour t’en charger, je compte sur ta parole, je ne te demande pas un serment. Celui qui ne craint pas d’en violer un en violera bientôt deux. Mais, dans nos différentes sphères, nous vivrons avec tant de sincérité, que le temps ne donnera par nous aucune preuve nouvelle de cette double vérité. Tu t’es montré sujet loyal, et moi bon prince.

(Ils sortent.)


Scène III

Tyr. Un vestibule du palais.

Entre Thaliard

Thaliard : Voici donc Tyr et la cour. C’est ici qu’il me faut tuer le roi Périclès ; et si j’y manque, je suis sûr d’être tué à mon retour. C’est dangereux. Allons, je m’aperçois qu’il fut sage et prudent, celui qui, invité à demander ce qu’il voudrait à un roi, lui demanda de n’être admis à la confidence d’aucun de ses secrets. Je vois bien qu’il avait raison ; car si un roi dit à un homme