Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1865, tome 1.djvu/277

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rigine et le commencement de sa douleur — proviennent d’un amour dédaigné… Eh bien, Ophélia ? — vous n’avez pas besoin de nous répéter ce qu’a dit le seigneur Hamlet ; nous avons tout entendu… Monseigneur, faites comme il vous plaira ; — mais, si vous le trouvez bon, après la pièce, il faudrait — que la reine sa mère, seule avec lui, le pressât — de révéler son chagrin. Qu’elle lui parle vertement ; — et moi, avec votre permission, je me placerai à la portée — de toute leur conversation. Si elle ne parvient pas à le pénétrer, — envoyez-le en Angleterre ; ou reléguez-le dans le lieu — que votre sagesse aura choisi.
LE ROI.

Il en sera fait ainsi : — la folie chez les grands ne doit pas rester sans surveillance.

Ils sortent.

SCÈNE IX.
[La grand’salle du château.]
Entrent Hamlet et plusieurs Comédiens.
HAMLET.

Dites, je vous prie, cette tirade comme je l’ai prononcée devant vous, couramment ; mais si vous la braillez, comme font beaucoup de nos acteurs, j’aimerais autant faire dire mes vers par le crieur de la ville. Ne sciez pas trop l’air ainsi, avec votre bras ; mais usez de tout sobrement ; car, au milieu même du torrent, de la tempête, et, je pourrais dire, du tourbillon de la passion, vous devez avoir et conserver une modération qui lui donne de l’harmonie. Oh ! cela me blesse jusque dans l’âme d’entendre un robuste gaillard, à perruque échevelée, mettre une passion en lambeaux, voire en haillons, et fendre les