Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1865, tome 2.djvu/83

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et suivit son mystérieux ami jusqu’à un endroit écarté où elle vit quatre hommes et huit femmes, portant le plaid écossais. La plus belle de ces femmes, qui toutes étaient fort jolies, lui adressa aussitôt la parole : — Bonjour, Bessie. Veux-tu t’en venir avec moi ?

Élisabeth, tout effrayée, fit un signe de refus. Sur quoi les douze personnages disparurent dans un tumulte qui ressemblait à un ouragan.

— Rassure-toi, Bessie, fit doucement Thomas. La personne qui vient de te parler ne te veut que du bien. Te souviens-tu qu’un soir, — il n’y a pas longtemps, — une inconnue est entrée dans ta chambre, tandis que tu étais au lit, malade, et que tu t’es levée pour lui donner à boire ?

— Oui.

— Eh bien, cette inconnue est la même personne qui vient de te parler. C’est une bien grande dame, sais-tu bien, Bessie ? Sa majesté la reine des fées, ni plus ni moins. La reine n’est pas seulement belle ; elle est bonne et puissante. Et, si tu consens à quitter ce monde pour aller vivre dans son royaume, elle fera ton bonheur, comme elle a fait le mien. Regarde-moi, n’ai-je pas un air de prospérité qui fait envie ? Allons, décide-toi, Bessie, partons !

Et ce disant, Thomas tira Élisabeth par son tablier.

— Laissez-moi, repartit la fermière d’un ton offensé. Quitter ainsi mon André ! quitter ainsi mes enfants ! jamais ! et que diraient-ils, ces pauvres petits, en ne voyant pas revenir leur mère ?

— Allons, chère Bessie, fit le revenant d’un ton câlin. Ne te fâche pas. Je t’ai dit que notre reine voulait ton bonheur, mais ce n’est pas un bonheur forcé. Reste donc sur cette terre, avec ton mari, avec tes enfants, dans ton ménage. Moi, il faut que je m’en aille, car on m’attend.