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RICHARD III.

LADY ANNE.

Eh ! c’était lui.

RICHARD.

— C’en est un du même nom, mais d’une nature meilleure.

LADY ANNE.

— Où est-il ?

RICHARD.

Ici.

Lady Anne lui crache au visage.

Pourquoi craches-tu sur moi ?

LADY ANNE.

— Je voudrais que ce fût pour toi du poison mortel !

RICHARD.

— Jamais poison n’est venu de si doux endroit.

LADY ANNE.

— Jamais poison ne dégoutta sur un plus hideux crapaud. — Hors de ma vue ! tu blesses mes yeux.

RICHARD.

— Tes yeux charmants ont blessé les miens.

LADY ANNE.

— Que ne sont-ils des basilics pour te frapper à mort !

RICHARD.

— Je le voudrais, afin de mourir tout d’un coup ; — car maintenant ils me tuent d’une mort vivifiante. — Tes yeux ont tiré des miens des pleurs amers — et terni mes regards de leur enfantine ondée. — Jamais je n’avais versé une larme de pitié, — pas même quand mon père York et Édouard sanglotaient — en entendant les cris douloureux de Rutland — frappé à coups d’épée par le noir Clifford ; — pas même lorsque ton vaillant père faisait, comme un enfant, — le triste récit de la mort de mon père, — s’interrompant vingt fois pour soupirer et gémir, — et que tous les auditeurs avaient les joues mouillées — comme