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APPENDICE.

s’obligèrent par belle écriture de leurs mains l’un à l’autre.

Quand l’obligation fut faite, Bernard demeura à Paris, et Ambroise s’en vint à Gênes le plus tôt qu’il put ; et quand il y eut demeuré quelques jours, et qu’il se fut informé finement du nom de la rue, et des conditions de la dame[1], il en ouït dire ce que Bernard lui en avait dit et encore plus, au moyen de quoi il lui sembla avoir fait une folle entreprise ; mais à la fin, s’étant accointé d’une pauvre femme qui fréquentait souvent chez elle et que la dame aimait bien, ne la pouvant conduire à autre chose, il la corrompit par argent et se fit mettre en un coffre fait artificieusement à son plaisir, puis se fit porter par elle non-seulement en la maison, mais en la chambre de l’honnête femme ; et là, comme si la bonne femme s’en voulait aller en quelque lieu dehors, elle pria, selon l’ordre qu’avait donné Ambroise, qu’on lui gardât son coffre pour quelques jours. Lequel étant ainsi demeuré en la chambre, et la nuit venue, Ambroise, lorsqu’il pensa que la dame dormait, ouvrit le coffre avec certains engins qu’il avait portés sur lui, et sortit en la chambre, où il trouva une lumière allumée avec laquelle il commença à regarder la situation de cette chambre, les peintures et toutes les autres choses notables qui y étaient, qu’il retint en sa mémoire. De là il s’approcha du lit, et sentant que la dame et une petite fille qui était avec elle dormaient fort, il la découvrit toute, tout bellement, et vit qu’elle était aussi belle nue comme vêtue ; mais il ne vit aucun signe sur elle, pour en pouvoir faire rapport, sinon un qu’elle avait sous la mamelle gauche, c’est à savoir un porreau autour duquel il y avait quelques petits poils blonds comme de l’or. Et ayant vu ceci, il la

  1. Imogène, dans Cymbeline.