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VÉNUS ET ADONIS.

c’est une chimérique fantasmagorie, une erreur enfantine qui cause leur frayeur ; elle les somme de ne plus trembler, les somme de ne plus rien craindre ; et aussitôt elle aperçoit le sanglier poursuivi.

CLI

Sa gueule couverte d’écume et toute rouge, semble contenir du sang et du lait mêlés ensemble ; une nouvelle frayeur s’empare de Vénus, qui court en insensée sans savoir où ; elle s’élance d’un côté, puis, ne voulant pas aller plus avant, elle revient sur ses pas pour crier sus au sanglier assassin.

CLII

Mille émotions l’entraînent en mille sens ; elle revient dans les sentiers qu’elle a parcourus ; sa précipitation excessive est soumise à des temps d’arrêt, comme les allures d’une personne ivre ; pleine de réflexions sans réfléchir à rien, elle entreprend tout sans rien effectuer.

CLIII

Ici elle trouve un chien tapi dans un fourré, et demande à l’animal harassé où est son maître ; la elle en trouve un autre en train de lécher sa blessure, — unique et souverain remède contre les plaies envenimées ; plus loin elle en rencontre un autre tristement rechigné ; elle lui parle, et il lui répond par un hurlement.

CLIV

À peine ses cris déchirants ont-ils cessé qu’un autre pleureur aux lèvres pendantes, noir et sinistre, fait éclater