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LE ROI LEAR.

albany et cornouailles.

Cher sire, arrêtez (22).

kent.

— Va ! tue ton médecin, et nourris de son salaire — le mal qui te ronge !… Révoque ta donation, — ou, tant que je pourrai arracher un cri de ma gorge, — je te dirai que tu as mal fait.

lear.

Écoute-moi, félon ! — Sur ton allégeance, écoute-moi ! — Puisque tu as tenté de nous faire rompre un vœu, — ce que jamais nous n’osâmes ; puisque, dans ton orgueil outrecuidant, — tu as voulu t’interposer entre notre sentence et notre autorité, — ce que notre caractère et notre rang ne sauraient tolérer, — fais pour ta récompense l’épreuve de notre pouvoir. — Nous t’accordons cinq jours pour réunir les ressources — destinées à te prémunir contre les détresses de ce monde. — Le sixième, tu tourneras ton dos maudit — à notre royaume ; et si, le dixième, — ta carcasse bannie est découverte dans nos domaines, — ce moment sera ta mort. Arrière !… Par Jupiter, — cet arrêt ne sera pas révoqué.

kent.

— Adieu, roi. Puisque c’est ainsi que tu veux apparaître, — ailleurs est la liberté, et l’exil est ici !

À Cordélia.

— Que les dieux te prennent sous leur tendre tutelle, ô vierge, — qui penses si juste et qui as si bien dit !

À Régane et à Goneril.

— Et puissent vos actes confirmer vos beaux discours, — et de bons effets sortir de paroles si tendres !

Aux ducs d’Albany et de Cornouailles.

— Ainsi, ô princes, Kent vous fait ses adieux : — il va acclimater ses vieilles habitudes dans une région nouvelle.

Il sort.