Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1873, tome 12.djvu/126

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gower.

Eh ! c’est un hâbleur, un sot, un coquin, qui de temps à autre va à la guerre pour se pavaner, à son retour à Londres, sous les allures d’un soldat. Ces gaillards-là savent parfaitement les noms des principaux commandants ; ils apprendront par cœur quelles affaires ont eu lieu ; à quelles tranchées, à quelle brèche, à quel convoi ; qui s’est bravement comporté, qui a été fusillé, qui dégradé ; quelles étaient les positions de l’ennemi ; et ils vous répéteront tout çà couramment en style militaire orné des jurons les plus neufs. Et vous ne sauriez imaginer le merveilleux effet qu’une barbe taillée comme celle du général et une horrible défroque rapportée du camp peuvent produire au milieu des bouteilles écumantes sur des cerveaux arrosés d’ale ! Mais il vous faut apprendre à reconnaître ces misérables qui déshonorent le siècle, où vous ferez de merveilleuses méprises.

fluellen.

Je vais vous dire, capitaine Gower, je vois bien qu’il n’est pas ce qu’il voudrait passer dans le monde pour être. Si je puis trouver un trou dans sa cotte, je lui dirai mon opinion.

On entend le tambour.

Écoutez, le roi arrive, et il faut que je lui donne des nouvelles du pont.


Entrent le roi Henry, Glocester et des soldats.


fluellen.

Tieu pénisse Votre Majesté !

le roi.

Eh bien, Fluellen, viens-tu du pont ?

fluellen.

Oui, s’il plaît à Votre Majesté ! Le duc d’Exeter a fort faillamment défendu le pont. Le Français est parti, voyez-vous ; et il y a un libre et peau passage à présent. Mor-