Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1873, tome 12.djvu/205

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bedford.

— Glocester, pourquoi doutes-tu de mon ardeur ? — J’ai dans ma pensée rassemblé une armée — dont la France est déjà inondée.


Entre un troisième messager.


troisième messager.

— Mes gracieux lords, dussé-je ajouter aux larmes — que vous versez en ce moment sur le cercueil du roi Henry, — je dois vous instruire d’un terrible combat — entre le grand lord Talbot et les Français.

winchester.

— Un combat où Talbot a triomphé, n’est-ce pas ?

troisième messager.

— Oh ! non, où lord Talbot a eu le dessous. — Je vais vous en conter plus au long les détails. — Le dix août dernier, ce redoutable lord, — venant de lever le siége d’Orléans, — et ayant à peine six mille hommes de troupes, — a été enveloppé et attaqué — par vingt-trois mille Français ; — il n’a pas eu le temps de ranger ses hommes ; — il n’avait pas de piques à placer devant ses archers ; — on les a remplacées par des pieux pointus, arrachés aux haies, — qu’on a plantés en terre confusément — pour empêcher la cavalerie de briser nos lignes. — Le combat a duré plus de trois heures ; — Talbot, d’une vaillance inimaginable, — faisait des prodiges avec son épée et sa lance ; — il envoyait aux enfers des centaines d’ennemis, et nul n’osait lui tenir tête ; — ici, là, partout, il tuait avec rage ; — les Français s’écriaient que le diable était dans la mêlée ; — toute leur armée demeurait ébahie de lui ; — ses soldats, remarquant sa valeur indomptée, — criaient en masse : Talbot ! Talbot ! — et se jetaient dans les entrailles du combat. — Cet élan eût mis le sceau à la victoire, — si sir John Falstaff n’avait agi comme un