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SCÈNE XXII.

tous. — Maintenant, Montague, tiens-toi bien ; je vais te chercher, — pour que les os de Warwick tiennent compagnie aux tiens.

Il sort.
warwick.

— Ah ! qui est près d’ici ? Venez à moi, ami ou ennemi, — et dites-moi qui est vainqueur, York ou Warwick ? — À quoi bon cette demande ? Ma personne mutilée prouve, — mon sang qui coule, mes forces épuisées, mon cœur défaillant prouvent — qu’il me faut abandonner mon corps à la terre, — et, par ma chute, la victoire à mon ennemi. — Ainsi sous le tranchant de la hache tombe le cèdre — dont les bras donnaient abri à l’aigle princier, — à l’ombre duquel dormait le lion rampant, — dont la cime dominait l’arbre touffu de Jupiter — et protégeait l’humble arbrisseau contre le vent formidable de l’hiver. — Ces yeux, qui maintenant sont obscurcis par le voile noir de la mort, — ont été aussi perçants que le soleil de midi, — pour pénétrer les secrètes trahisons du monde. — Les rides de mon front, maintenant remplies de sang, — furent souvent comparés à des sépulcres de rois ; — car quel était le roi vivant dont je ne pusse creuser la tombe ? — Et qui osait sourire quand Warwick fronçait le sourcil ? — Hélas ! voilà ma gloire souillée de poussière et de sang ! — Mes parcs, mes promenades, les manoirs que j’avais — m’abandonnent désormais ; et il ne me reste — de toutes mes terres que la longueur de mon corps ! — Ah ! qu’est-ce que la pompe, le pouvoir, l’empire, si ce n’est terre et poussière ? — Et, quelle que puisse être notre vie, nous n’en devons pas moins mourir.


Entrent Oxford et Somerset.
somerset.

— Ah ! Warwick ! Warwick ! si tu étais comme nous sommes, — nous pourrions encore réparer toutes nos per-