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10 COMME IL VOUS PLAIRA.

paysanne, et l’amour engendre la noblesse chez un simple pâtre.

À ce tableau de la vie selon la nature, fait contraste le tableau vigoureux de la société et de la famille féodales qui remplit tout le premier acte, et les sombres teintes de la réalité font ainsi paraître plus aimables les tendres couleurs de l’utopie et du rêve. On peut présenter le premier acte comme une des peintures les plus précieuses qui nous aient été transmises du monde féodal. C’est la société du moyen âge vue non dans ses pompes et ses solennités, ou au travers de ses grands personnages, mais dans son intimité, dans sa familiarité de chaque jour et au travers de ses acteurs ordinaires. La famille féodale surtout apparait tout entière, dans ce microcosme, avec ses violences, ses iniquités et aussi ses vertus : voici le frère aîné brutal et tyrannique, le frère cadet destiné aux ordres, le plus jeune frère maltraité et réduit à la condition de paysan, le vieux serviteur qui naissait et mourait dans la maison, attaché à la famille comme le lierre au chère. Le portrait du vieil Adam est le plus admirable qui noas ait été transmis de la domesticité féodale, et il n’est pas douteux qu’il ait été présent à la pensée de sir Walter Scott lorsque le grand romancier a tracé le portrait eu serviteur des Ravenswood dans La fiancée de Lammertnoor. Ainsi nous ne sommes pas seulement redevables à Shakespeare du portrait du vieil Adam, mais encore ce celui de Caleb Balderstone, qui n’eût peut-être jamas existé, si l’ami d’Orlando n’était pas venu dans le monte

— poétique deux siècles avant lui.

En quel lieu se passe la comédie de Shakespeare ? La plupart des commentateurs s’accordent à jsenser que è lieu de cette scène est le pays vague du caprice, queiqiE chose comme l’île de Prospéro, et que cette forêt ds Ardennes. où lf}g palmiers croissent près - des chênes, 6. dont les buissons servent d’abri aux lionnes, est une fjrê de pure fantaisie. Nous croyons qu’il n’en est rien