Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1867, tome 3.djvu/379

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Messire Tobie. — Et parbleu, il a trois mille ducats de rente.

Maria. — Oui, mais il ne faudra qu’une année pour tous ces ducats : c’est vraiment un sot et un prodigue.

Messire Tobie. — Fi, oses-tu parler ainsi ! il joue de la viole de Gambo et il parle trois ou quatre langues, mot pour mot, sans livres, et il a tous les beaux dons de nature.

Maria. — C’est vrai, c’est presque un idiot par nature ; car outre que c’est un sot, c’est aussi un grand querelleur, et n’était qu’il a le don de lâcheté pour corriger ses goûts de querelleur, les gens prudents pensent qu’il recevrait bientôt le don d’une tombe.

Messire Tobie. — Par cette main, ceux qui parlent ainsi de lui sont des drôles et des subtracteurs. Qui sont-ils ?

Maria. — Ce sont ceux qui ajoutent en outre qu’il s’enivre tous les soirs en votre compagnie.

Messire Tobie. — C’est en portant la santé de ma nièce. Je boirai à la santé de ma nièce aussi longtemps qu’il y aura un passage dans mon gosier et du vin en Illyrie. C’est un lâche et un bas valet, celui qui refuse de boire à la santé de ma nièce jusqu’à ce que la tète lui tourne comme uue grande toupie de paroisse. Allons, fillette, prends moi un sérieux de Castillan, car voici venir Messire André Aguecheek.

Entre Messire ANDRÉ AGUECHEEK.

Messire André. — Messire Tobie Belch ! eh bien, comment va, Messire Tobie Belch ?

Messire Tobie. — Aimable Messire André !

Messire André. — Dieu vous bénisse, belle pie-grièche.

Maria. — Et vous aussi, Monsieur.

Messire Tobie. — Accoste, Messire André, accoste.

Messire André. — Qu’est-ce que c’est, ça ?

Messire Tobie. — La femme de chambre de ma nièce.

Messire André. — Bonne Madame Accoste, je désire faire plus ample connaissance avec vous.

Maria. — Mon nom est Maria, Monsieur.