Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1873, tome 10.djvu/108

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cependant il m’a dit que par la suite je pourrais en savoir davantage.

BELARIUS. — En campagne ! en campagne ! (A Imogène.) Nous vous laissons pour le moment ; rentrez et reposez-vous.

ARVIRAGUS. — Nous ne serons pas longtemps absents.

BELARIUS. — Je vous en prie, n’allez pas être malade ; car il faut que vous nous teniez lieu de ménagère.

IMOGÈNE. — En bonne ou mauvaise santé, je vous reste attaché.

BELARIUS. — Et pour toujours. (Imogène entre dans la grotte.) Quoique dans la détresse, ce jeune homme paraît avoir eu de nobles ancêtres.

ARVIRAGUS. — Avec quelle voix d’ange il chante !

GUIDERIUS.— Et son élégante cuisine ! il a découpé nos racines comme des dessins, et assaisonné notre potage, comme si Junon eût été malade et qu’il fût son infirmier.

ARVIRAGUS. — Noblement il associe un sourire avec un soupir, si bien qu’on dirait que le soupir n’est ce qu’il est que par regret de ne pas être un sourire, et que le sourire faille le soupir-de s’échapper d’un temple aussi divin pour aller se mêler aux vents qu’invectivent les matelots.

GUIDERIUS. — Je remarque que le chagrin et la patience, également implantés en lui, mêlent ensemble leurs racines.

ARVIRAGUS. — Grandis, patience ! et que ce sureau infect, le chagrin, débarrasse de ses racines frappées de mort la vigne croissante !

BELARIUS. — Il est grand matin. Allons, partons. — Qui est ici ?

Entre CLOTEN.

CLOTEN. — Je ne puis trouver ces fugitifs : ce scélérat s’est moqué de moi : — je suis anéanti de fatigue.

BELARIUS. — Ces fugitifs ! n’est-ce pas de nous qu’il veut parler ? Je le reconnais à peu près ; c’est Cloten, le fils de la reine. Je crains quelque embûche. Voilà bien des années que je ne l’ai vu, et cependant je le reconnais. — Nous sommes mis hors la loi. — Partons vite. !