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ŒUVRES EN PROSE

un reproche pour les personnes qui les soutiennent, et dès lors nous nous exposons à être accusés comme pamphlétaires. Car les personnes qui subissent ainsi un blâme direct ou indirect, diront pour leur défense que la démonstration de leur corruption est malfaisante ou inconvenante. En conséquence, celui qui formule un reproche s’expose bel et bien à trois ans de prison.

Existe-t-il une liberté de la presse, avec des restrictions aussi accommodantes ?

Le peu de liberté dont nous jouissons sous ce point de vue si important, nous le devons à la clémence de nos gouvernants, ou à ce qu’ils craignent que l’opinion publique, prenant l’alarme à la vue de son état d’esclavage, ne fasse valoir violemment le droit de prendre du champ et de l’espace. Cependant, l’opinion publique peut n’être pas toujours aussi formidable ; les gouvernants peuvent se montrer moins endurants ou moins craintifs. À tout prendre, des maux, et de grands maux résultent du système actuel d’esclavage intellectuel, et vous avez assez à réfléchir, quand il ne resterait que ce grief dans la constitution de la société.

Je me bornerai à donner un exemple de l’état présent de notre presse.

En ce moment un de vos compatriotes est enfermé dans une prison anglaise. Sa santé, sa fortune, son énergie souffrent de cette réclusion rigoureuse. L’air qui pénètre à travers les barreaux d’une prison ne fortifie point la santé et ne ranime point les esprits. Mais M. Finnerty, malgré tout ce qu’il a perdu, conserve encore une bonne renommée de sin-