Page:Sheridan - OEuvres de Sheridan (Laroche).djvu/11

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allèrent se promener dans le jardin ; à leur retour, ils le trouvèrent mort.

Le docteur Shéridan a laissé divers écrits qui indiquent une connaissance profonde de l’antiquité ; entre autres, une version élégante et fidèle du Philoctète de Sophocle, et une traduction des satires de Perse, enrichie de notes curieuses et savantes.

Le troisième fils du docteur Shéridan, Thomas, père de Richard Brinsley, naquit à Dublin en 1719, et eut l’honneur d’avoir Swift pour parrain. Il possédait, comme son père, beaucoup d’instruction classique, des manières agréables, un caractère plein d’amabilité et de franchise. Swift lui conseillait de se vouer à l’enseignement, dont son amitié lui eût aplani la carrière. Son étoile en décida autrement. Après avoir donné quelque temps des leçons publiques de déclamation et d’improvisation oratoire, il adopta la profession du théâtre, dont il avait résolu d’entreprendre la réforme, débuta à Dublin, en 1743, dans le rôle de Richard III, obtint un éclatant succès, passa en Angleterre, joua à Drury-Lane et à Covent-Garden, puis revint dans sa ville natale, où il prit la direction du théâtre de Dublin, position qu’il occupa long-temps avec éclat. Mais une sorte de fatalité héréditaire s’attacha à tous ses pas ; ses efforts et même ses succès furent impuissans à fixer la fortune ; et après avoir passé par les situations les plus diverses, il termina le 14 août 1788 son incertaine et aventureuse carrière.

Françoise Shéridan, sa femme, et mère de Richard Brinsley, était une dame distinguée par les grâces de son esprit non moins que par ses talens littéraires. Elle a laissé des romans estimes et quelques comédies qui, bien qu’inférieures à celles de son illustre fils, ne sont cependant pas sans mérite.

Le second fils de ce couple ingénieux et littéraire, Richard Brinsley Shéridan, naquit à Dublin en 1751 ; il fit ses études au collége d’Harrow, cette pépinière de grands hommes d’où sont sortis Byron, Peel, et tant d’autres personnages éminens dans les lettres ou dans les luttes parlementaires. De même que Byron et à l’inverse de Peel, Shéridan fut un assez mauvais écolier ; la paresse, le far niente, avaient pour lui plus de charmes que Virgile, Sophocle et Cicéron. À dix-huit ans il quitta le collége et se retira à Bath chez son père, qui lui donna d’excellentes leçons de débit et d’élocution. Ce fut alors que se développa dans le jeune Shéridan le germe de ce talent oratoire qui devait plus tard jeter tant d’illustration sur sa carrière. Mais une préoccupation plus puissante vint bientôt disputer à l’éloquence la possession exclusive de ce cœur jeune et ardent.

Miss Elisabeth Linley faisait alors les délices de la société aristocra-