Page:Siefert - Rayons perdus.djvu/65

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Et tu peux donc aimer, toi, qui ne m’aimes pas ?
Mais quel déchirement qu’une telle pensée,
Dans ma blessure encor, quelle épine enfoncée !


II.

Oh ! ce sonnet me pèse à l’égal d’un remord !
Que je m’occupe ou non, que je veille ou je rêve,
Ce souvenir ne peut me laisser paix ni trêve,
Car pour moi chaque vers est un serpent qui mord.

L’épreuve est salutaire alors qu’elle rend fort
Et d’un souffle puissant jusqu’au ciel nous enlève,
Mais tout ressentiment transperce comme un glaive,
Et ces angoisses-là sont angoisses de mort.

Arrière donc, vipère à la langue empestée,
Amertume égoïste & vile, pour jamais
Retourne au gouffre noir qui t’avait enfantée !

Moi, je veux vivre, aimer & sentir désormais
Tout ce que peut souffrir une âme généreuse,
Qui demande au devoir le secret d’être heureuse