Page:Signoret - La Souffrance des eaux, 1899.djvu/45

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On tend la voile d’or, son ombre est rayonnante ; Au loin les chênes noirs et les verts citronniers Décroissent sur la rive et la vague tonnante Découpe, à son fracas, le chant des nautonniers :

« Adieu lacs blanchissants, chênes, torrents, vallées, « Antres pleins de ruisseaux et fermés de rochers ! « Nous montons sur les mers par les brouillards voilées « Car la terre est sans fruits, car les dieux sont cachés.

« Tu partis d’Orient, lumière ; le grand âge « Tant tu bus d’océans, tant tu gravis de monts, « Ô lumière ! a flétri ton éclatant visage ; « Nous ne te voyons plus, lumière, et nous t’aimons,

« En ancres nous avons courbé le fer des coutres, « Le vieux vent des sillons dans la voile a soufflé, « Nous avons emporté les sources dans des outres, « Du blé de neuf moissons le vaisseau s’est enflé.

« Là-bas l’autre soleil se forme aux cieux fertiles, « Entre nos bras nerveux nous le ramènerons, « Sur les îles des mers nous sèmerons des villes « Au tonnerre des luths et des fougueux clairons ! »