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Elégie I




Mers ! la nef douloureuse aux sombres voiles d’or
Sur vos vagues glissant emporta loin du bord
La déesse aux beaux yeux de ses cheveux voilée :
Des échos de mon cœur a tremblé la vallée.
J’ai faim et soif sur mes sommets étincelants ;
Celle qui fut l’aurore élevant ses bras blancs
Ne me tend plus ses purs calices de rosée,
La statue aux yeux d’or de l’aurore est brisée,
Sur l’ivoire du luth ruisselle un lierre amer,
Le front taché de sang la lune est sur la mer,
Le pain ne fleurit plus sur les blés pour ma table,
L’eau coule et n’inscrit plus ses formes sur le sable :
Je suis le chêne en fleurs dont la force a ployé.
Tout le ciel sur moi croule et je meurs foudroyé.