Page:Silvestre - Histoires belles et honnestes, 1883.djvu/168

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

dans le plus parfait hébêtement, après s’être frotté vigoureusement les paupières pour bien s’assurer qu’il n’était pas le jouet d’un mauvais rêve, il se mit à parcourir sa maison, comme un fou, en appelant, en hurlant, en se cognant la tête aux murailles. Mais tout ce vacarme n’éveilla aucun écho humain. Alors il sortit en courant et se rendit chez le commissaire. Celui-ci, qu’un ami attendait pour prendre le vermouth, le reçut assez mal. Sa déclaration fut cependant consignée tant bien que mal sur un registre crasseux. Mais Bergace ne s’en tint pas là. Sautant dans un fiacre, il se fit trimballer, durant la nuit entière, partout où un pressentiment fugitif lui montrait les deux coupables et, la gorge pleine de pardons entrecoupés, il gémissait des mots sans suite ! « Revenez, malheureux !... j’aime mieux être cocu !... Mon petit Papoul… ma chère Micheline !... C’est moi qui ai tous les torts !... Je m’en irai si vous voulez, mais ne mourez pas !... » Tandis qu’il se lamentait dans l’ombre, des rôdeurs de barrière assommèrent son cocher et lui volèrent tout ce qu’il possédait lui-même. L’aube aux doigts de corail le trouva sur un tertre de gazon, tout endolori