Page:Silvestre - Histoires belles et honnestes, 1883.djvu/229

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

grands les rideaux à une vraie fusée de soleil.

Soudain noyé de cette lumière joyeuse et reconnaissant l’appartement où il avait été jadis si heureux, Gontran, dont on avait apporté la cage dans la chambre, suivant les conventions que j’ai dites, eut un éblouissement. Sa langue si longtemps muette se délia soudain et il se mit à clamer son bonheur avec un vacarme épouvantable. Ce fut alors qu’on put voir qu’il n’avait pas perdu son temps dans le silence du cabinet (l’expression est consacrée et ne fut jamais plus juste). Car, avec une fidélité admirable, mais en enflant considérablement leur intensité, il se mit à reproduire tumultueusement tous les bruits qu’il avait entendus dans le buen retiro de Mme Minaret. Ce fut un déchaînement d’ouragan, une colère d’Eole sans quos ego pour la calmer, une musique endiablée de vents saluant la liberté, une tempête non pas dans un crâne mais ailleurs. On dut l’entendre jusqu’à Soissons dont les habitants frémirent d’aise, étant grands connaisseurs en ce genre d’orchestration.

Cependant la pauvre Eva, derrière sa portière, entendait ce charivari et, croyant son mari seul dans la chambre, conçut une indignation