Page:Silvestre - Histoires belles et honnestes, 1883.djvu/234

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joyeux « débiteurs et emprunteurs » comme les nommait mon maître Rabelais. Non pas que la malhonnêteté ait cessé de fleurir dans notre glorieux pays, mais ce n’est plus guère au détriment des marchands de culottes et autres menus fournisseurs qu’elle s’exerce. Voler le fretin est vraiment affaire de petites gens et nous faisons plus grand que cela. Parlez-moi des immenses entreprises où l’on ruine un cent de familles entre ses deux repas. Voilà qui est autrement louable que de faire courir un pauvre commerçant après son argent. Le doux Panurge a fait place à Mercadet. Moi, je regrette le doux Panurge. Mais il paraît qu’il n’en est pas encore ainsi sur toute la surface du globe, et qu’en Hongrie, par exemple, il est encore de bon ton de solder le plus longtemps possible ses comptes en belle monnaie de singe. Ainsi faisait le prince Ladislas Capador, un des plus nobles hommes de Pesth et des plus élégants, et qui, au commencement de l’hiver qui finit, devait à son tailleur, le juif Mathias Truc, quatre ou cinq années pleines de coûteuses fournitures, ce qui n’est pas un mérite infime, car tout le monde sait que les fils d’Israël n’aiment pas à voir courir leurs