Page:Silvestre - Le Conte de l’Archer, 1883.djvu/163

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
143
Le Conte de l’Archer.

jamais cultivées. Nous instituons des prix pour ceux d’entre nous qui font les plus beaux croisements de chevaux et de chiens, et nos canards domestiques sont devenus si jolis que c’est tout au plus si les petits pois osent s’asseoir en leur compagnie.

Eh bien, je vous jure que si j’étais seulement empereur d’Occident, ce qui est une ambition plus commune qu’on ne le croit, ayant des châteaux forts avec de sombres cachots et de profondes oubliettes, je garderais ces prisons ténébreuses, non pas aux pauvres voleurs qui bien souvent ont la faim pour excuse, et moins encore aux vagabonds qui, après tout, ont droit à l’air et au soleil comme tout le monde, mais aux chercheurs de dots qui, pour devenir riches, se seraient sciemment exposés à faire de vilains enfants avec des femmes sans beauté. Et les traiterais-je si rudement que j’irais compisser moi-même la paille de leur cellule pour être sûr qu’elle fût toujours humide, et que je ferais noircir leur pain par mes peintres ordinaires afin qu’il fût moins appétissant. Et ne les laisserais-je sortir qu’une fois l’an, ridiculement attachés sur des ânes, avec des sacs d’écus aux pieds pour leur tirer les jambes en grotesque procession que les petits polissons suivraient en leur