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Le Conte de l’Archer.

Pour ce qui est du moral, c’est autre chose et j’y regarde de fort près, avec mes meilleures lunettes. Je puis donc vous assurer que celui de notre Tristan valait mieux que son fâcheux physique. Non point qu’il fût d’une remarquable intelligence : il était, au contraire, plutôt borné et disposé à se demander pourquoi deux et deux font quatre. Non pas qu’il fût hardi et courageux : c’était, au contraire, un franc poltron et qui avait peur même de son ombre. Non pas qu’il eût de la repartie : il n’avait pas son pareil pour demeurer bêtement la bouche ouverte quand il s’agissait de faire rire le monde, comme c’est le devoir de tout bon Tourangeau.

Eh bien alors ?

Eh bien, il avait une qualité maîtresse et qui, pour moi, tient lieu de toutes les autres. Il avait une âme vraiment sensible et compatissante et ouverte à toutes les choses de la tendresse. Il aimait les animaux comme des frères, ce qui n’est pas toujours, au demeurant, bien flatteur pour ceux-ci, mais part d’un bon naturel. Jamais on ne le devait voir poursuivre les chiens errants avec des pierres, fouetter les chevaux au repos pour les faire bondir, ni, comme les garçonnets plus âgés que lui, tendre des pipeaux sous les bran-