Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, I.djvu/188

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blissements anglais dans les Indes orientales[1]. Dans un pays fertile qui a déjà été extrêmement dépeuplé, où, par conséquent, la subsistance ne devrait pas être très-difficile, et où, malgré tout cela, il meurt de faim, dans le cours d’une année, trois à quatre cent mille personnes, il n’y a nul doute que les fonds destinés à faire subsister le travail du pauvre ne décroissent avec une grande rapidité. La différence qui se trouve entre l’état de l’Amérique septentrionale et celui des Indes orientales est peut-être le fait le plus propre à faire sentir la différence qui existe entre l’esprit de la constitution britannique, qui protège et gouverne le premier de ces pays, et l’esprit de la compagnie mercantile qui maîtrise et qui opprime l’autre[2].

Ainsi, un salaire qui donne au travail une récompense libérale est à la fois l’effet nécessaire et le symptôme naturel de l’accroissement de la richesse nationale ; celui qui ne fournit à l’ouvrier pauvre qu’une chétive subsistance est l’indication d’un état stationnaire ; et, enfin, celui qui ne lui donne pas même de quoi subsister et le réduit à mourir de faim signifie que les richesses décroissent avec rapidité[3].

Dans la Grande-Bretagne, le salaire du travail semble, dans le temps actuel, être évidemment au-dessus de ce qui est précisément nécessaire pour mettre l’ouvrier en état d’élever une famille. Pour nous en assurer, il ne sera pas nécessaire de nous jeter dans des calculs longs et incertains sur la somme qu’il faut à l’ouvrier pour lui donner cette possibilité. Il y a plusieurs signes certains qui démontrent que les salaires du travail ne sont, dans aucun endroit de ce pays, réduits à ce taux, qui est le plus bas que la simple humanité puisse accorder.

Premièrement, dans presque toutes les parties de la Grande-Bretagne, il y a une distinction entre les salaires d’été et ceux d’hiver ;

  1. Tel est aussi l’état de l’Irlande, cette hideuse plaie de l’Angleterre. (Consulter sur l’état économique et social de cette malheureuse contrée, le beau livre de M. Gustave de Beaumont : l’Irlande sociale, politique et religieuse, 2 vol. in-8o.) A. B.
  2. Voyez le livre IV, chapitre vii, section troisième, sur la fin.
  3. La population irlandaise ne meurt pas de faim parce que les richesses décroissent en Irlande, car elles y augmentent tous les jours ; mais parce qu’elles y sont distribuées avec iniquité. Un grand seigneur y dévore la substance de dix mille travailleurs. L’esclavage ancien et l’esclavage moderne n’offrent pas d’exemple d’un tel mépris de l’espèce humaine. A. B.