Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, I.djvu/227

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Quand il arrive que, en certaines localités, l’ouvrier n’est pas occupé constamment dans les mêmes métiers où, en général, il l’est constamment ailleurs, alors son salaire s’élève bien au-dessus de la proportion ordinaire avec le salaire du simple travail. À Londres, presque tous les compagnons de métier sont sujets à être arrêtés et renvoyés par leurs maîtres, d’un jour à l’autre ou de semaine en semaine, de la même manière que les journaliers dans les autres endroits. La plus basse classe d’artisans, celle des garçons tailleurs, y gagne en conséquence une demi-couronne[1] par jour, quoique 18 deniers[2] y puissent passer pour le salaire du simple travail. Dans les petites villes et les villages, au contraire, les salaires des garçons tailleurs sont souvent à peine au niveau de ceux des simples manœuvres ; mais c’est qu’à Londres ils restent souvent plusieurs semaines sans occupation, particulièrement pendant l’été.

Quand l’incertitude de l’occupation se trouve réunie à la fatigue, au désagrément et à la malpropreté de la besogne, alors elle élève quelquefois les salaires du travail le plus grossier au-dessus de ceux du métier le plus difficile. Un charbonnier des mines, qui travaille à la pièce, passe pour gagner communément, à Newcastle, environ le double, et dans beaucoup d’endroits de l’Écosse environ le triple des salaires du travail de manœuvre. Ce taux élevé provient entièrement de la dureté, du désagrément et de la malpropreté de la besogne. Dans la plupart des cas, cet ouvrier peut être occupé autant qu’il le veut. Le métier des déchargeurs de charbon à Londres égale presque celui des charbonniers pour la fatigue, le désagrément et la malpropreté ; mais l’occupation de la plupart d’entre eux est nécessairement très-peu constante, à cause de l’irrégularité dans l’arrivée des bâtiments de charbon. Si donc les charbonniers des mines gagnent communément le double et le triple des salaires du manœuvre, il ne doit pas sembler déraisonnable que les déchargeurs de charbon gagnent quatre et cinq fois la valeur de ces mêmes salaires. Aussi, dans les recherches que l’on fit, il y a quelques années, sur le sort de ces ouvriers, on trouva que sur le pied auquel on les payait alors, ils pouvaient gagner 6 à 10 schellings par jour ; or, 6 schellings sont environ le quadruple des salaires du simple travail à Londres, et dans chaque métier particulier

  1. Environ 5 francs.
  2. 18 décimes, ou 1 franc 80 centimes