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LA CORVÉE

en raconterais… Je vous parlerais de l’arrachage du lin, de ces journées presque féériques où l’un des arracheurs sort grandi par la lutte en tenant dans ses mains la queue du renard. Je vous ferais connaître les jeunesses qui sont venues lever la Grange-Neuve… ou celles qui ont arraché la pièce de patates du pied de la côte, l’automne où nous avons acheté la terre du voisin. Et la cuisine de la vieille maison… de combien de courvêes n’a-t-elle pas été témoin ? Il faudrait l’interroger pour qu’elle révélât tout ce monde de choses qu’elle emporte avec elle. Mais je veux lui dérober un souvenir ; elle me pardonnera bien car je l’aime toujours.

Eh donc ! un soir ce que j’ai vu et dont plusieurs n’ont peut-être pas entendu parler, c’est une courvée pour plumer les oies. Cet automne-là maman avait une grosse récolte d’oies et elle avait dit que nous rassemblerions les amis pour les plumer. Imaginez donc ! Pas moyen pour la famille de plumer quarante grosses oies dans une seule veillée ; et, passer une semaine à s’ébouillanter les doigts, le père n’aimait pas ces animaux jusqu’à ce point-là. Il ressemblait en cela à tous les cultivateurs de chez nous. Car chez nous les cultivateurs n’aiment pas en général à élever les oies et il faut