Page:Société Saint-Jean-Baptiste - La corvée (deuxième concours littéraire), 1917.djvu/237

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
229
LA CORVÉE DE L’ÉRABLE

— Mes enfants, répétait-il en lançant au plafond de puissantes bouffées, mes enfants, faites de la terre, rien que de la terre, et laissez-moi ces petits estèques qui conduisent à mourir la poche sur le dos !

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Le lendemain, il faisait un temps splendide, mais froid à pierre fendre. Dès sept heures, plus de deux cents attelages stationnaient sur la rue, devant l’église et dans les cours des maisons. Les chevaux, des pompons rouges aux œillères, sentaient la litière et leurs naseaux fumaient dans l’air glacial. La tuque sur les yeux, les hommes circulaient pour se réchauffer autour des traîneaux à ridelles chargés de rondins d’érable. Sur la belle écorce couleur de vieil argent, sur les sections blondes étoilées de moelle, de petits glaçons perlaient, où le soleil, par instants, allumait des éclairs.

Tout à coup, la cloche de l'église s'ébranla, puis sonna à toute volée, secouant sa joie dans l'air pur ; à ce moment, sur le seuil du presbytère, casqué, encapoté, la pipe aux dents, le curé Labelle parut entre ses marguilliers. Les hommes saluèrent d’un vigoureux hourrah ! sautèrent sur leur voyage, ramenèrent les guides, et le tintamarre follet des grelots répondit au salut du clocher.