Page:Sophocle (tradcution Masqueray), Tome 2.djvu/340

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Agité.

Le Coryphée.Au secours, gens du pays, au secours, chefs de la contrée ; venez vile, venez : ces gens-là dépassent toutes les bornes.

Arrive Thésée, en courant.

Thésée. — Quel est ce cri ? Que se passe-t-il ? De quoi avez-vous peur ? Je sacrifiais sur un autel au dieu marin, protecteur de ce dème, pourquoi m’avoir interrompu ? Expliquez-moi, que je sache tout, pourquoi je n’ai fait qu’un bond jusqu’ici ? Mes pieds auraient voulu aller moins vite.

Œdipe. — Cher Thésée, car j’ai reconnu ta voix, je viens d’essuyer de terribles outrages de la part de cet homme.

Thésée. — Quels outrages ? Quel en est l’auteur ? Parle.

Œdipe. — Ce Créon, que tu vois, vient de me ravir les deux filles qui me restaient.

Thésée. — Que dis-tu ?

Œdipe. — Tu sais maintenant ce que j’ai souffert.

Thésée.(A ses serviteurs : il montre du doigt l’autel de Poséidôn.) Quelqu’un d’entre vous n’ira-t-il pas au plus vite à cet autel-ci, et n’ordonnera-t-il pas au peuple entier, piétons, cavaliers, de quitter le sacrifice, de courir en toute hâte au point où se rencontrent les deux routes de voyageurs, pour que les jeunes filles ne passent pas et que je ne devienne pas pour mon hôte, après avoir subi une pareille violence, un objet de risée ? — (Un serviteur s’élance.) Va, exécute mes ordres, vite. — (Désignant Créon.) Quant à lui, si je me laissais aller à la colère qu’il mérite, je ne le laisserais pas sortir intact de mes mains. En cette circonstance les lois qu’il a introduites, en venant ici, — ces lois-là, pas d’autres, — seront celles d’après lesquelles il sera traité. — (A Créon.) Jamais tu ne sortiras de ce territoire, avant d’avoir devant mes yeux, ici même, ramené ces deux jeunes