Page:Sorel - Montesquieu, 1887.djvu/137

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policé tire cette subsistance du fonds des arts mêmes ; il donne aux uns les travaux dont ils sont capables ; il enseigne les autres à travailler, ce qui fait déjà un travail. » Que l’on ne s’y trompe point cependant, Montesquieu n’a en vue ici ni les ateliers nationaux ni le droit au travail, et ce qu’il érige en principe, c’est tout simplement la pratique des monarchies de l’ancien régime. Comparez avec ce chapitre des Hôpitaux le chapitre de Tocqueville sur les Mœurs administratives sous l'ancien régime, et vous aurez la véritable pensée de Montesquieu.

La monarchie qu’il considère toujours est la monarchie paternelle ; ses opinions sur les devoirs de l’État envers les sujets du prince, sortent de la même conception que sa hiérarchie de corps privilégiés et que son système de prérogatives. Toutes ces conséquences procèdent du principe même de la monarchie et du caractère féodal de ses origines. Une histoire des institutions féodales, c’est-à-dire la raison d’être historique de la monarchie et des privilèges, formait ainsi le complément de l’ouvrage de Montesquieu, et se rattachait par des liens multiples, un peu embrouillés sans doute, mais parfaitement noués cependant, à toutes les parties de l'Esprit des lois.

Très opposé, en ce point, comme en beaucoup d’autres, et très supérieur aussi à la plupart de ses contemporains, Montesquieu s’intéressait à l’histoire du moyen âge. Il cherchait dans les origines obscures de la France la loi des destinées de sa patrie. L’orgueil du gentilhomme s’y intéressait autant que la curio-