Page:Sorel - Réflexions sur la violence.djvu/96

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tion, obsédée et effrayée, n’intervienne pas auprès des chefs d’industrie et ne leur impose pas une transaction, qui devient un encouragement pour les propagandistes de la violence.

Que l’on approuve ou que l’on condamne ce qu’on appelle la méthode directe et révolutionnaire, il est évident qu’elle n’est pas près de disparaître ; dans un pays aussi belliqueux que la France, il y a des raisons profondes qui assureraient à cette méthode une sérieuse popularité, alors même que tant d’exemples ne montreraient pas sa prodigieuse efficacité. C’est le grand fait social de l’heure actuelle et il faut chercher à en comprendre la portée.


Je ne puis m’empêcher de noter ici une réflexion que faisait Clemenceau à propos de nos relations avec l’Allemagne, et qui convient tout aussi bien aux conflits sociaux quand ils prennent l’aspect violent (qui semble devoir devenir de plus en plus général au fur et à mesure qu’une bourgeoisie lâche poursuit davantage la chimère de la paix sociale) : « Il n’y a pas de meilleur moyen, disait-il, [que la politique de concessions à perpétuité] d’engager la partie adverse à demander toujours davantage. Tout homme ou toute puissance, dont l’action consiste uniquement à céder, ne peut aboutir ainsi qu’à se retrancher de l’existence. Qui vit, résiste ; qui ne résiste pas se laisse dépecer par morceaux. » (Aurore, 15 août 1905.)

Une politique sociale fondée sur la lâcheté bourgeoise, qui consiste à toujours céder devant la menace de violences, ne peut manquer d’engendrer l’idée que la bour-