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LE RAMAVANÂ. 187

lonté Puisque Lu oses te vanter ainsi devant moi de la force de ce Ràma qui t'oublie, c'est sans doute que tu n'as jamais entendu parler de ma vigueur sans égale. Me tenant au sein des airs, je pourrais enlever la terre d'un seul mouvement de mes bras ; je pourrais tarir l'Océan ainsi qu'une coupe vide; je pourrais tuer la Mort même, si elle luttait contre moi! lime serait aisé d'obscurcir le soleil par la foule de mes flèches aiguës et de briser l'univers jusqu'en ses fondements. Sache bien, insensée, que je suis ton maître, que je prends à mon gré toutes les apparences et que j'ac- corde à <'pux qui me plaisent les biens les plus désirés! o

Confirmant par la violence de ses actes la brutalité de ses paroles, le monstre saisit Sitâ, la place sur son char magique et l'enlève. Le merveilleux, qui jusque-là abondait déjà dans cette épopée, va y tenir dorénavant une place de plus en plus considérable. Il atteint des dimensions énormes et en- fante les plus incroyables fantaisies, sans que le poète semble douter un instant de leur réalité, pas plus que le public lui- même auquel il s'adresse et qui évidemment les acceptait les yeux fermés. L'imagination orientale se complaît dans les hyperboles ; la religion brahmanique multiplie les incarna- tions et les miracles ; la morale hindoue n'établit pas de di- vision tranchée entre les diverses classes de la création, entre les eénies et les hommes ou entre les hommes et les animaux : de là tant de récits bizarres, qui nous font sourire comme des contes d'enfants et qui paraissaient alors les plus simples et les plus logiques du monde. Ainsi, à l'endroit où nous sommes arrivés, le vieux roi des oiseaux, le vautour Dja- tàyouch, qui n'a guère que soixante mille ans, entend les [cris plaintifs de la princesse qu'il a promis de défendre et vient attaquer en face Râvana. La lutte de cet oiseau extraordinaire et de ce géant hideux est dépeinte avec les couleurs les plus vives et les plus frappantes. Djatayouch blesse le roi des Ràkchasas, le déchire à coups d'ongles, tue son cocher, brise son char ; mais il tombe, percé par son épée, et Sità pleure le sort de ce généreux champion. Emportée à travers les airs sur le sein de son ravisseur, elle se débat et se lamente

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