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Les brâhmanas se placent entre l’an 800 et l’an 600 avant l’ère chrétienne ; ils comprennent deux éléments : le dogme et l’exégèse. Ils ont été rédigés successivement, et toutefois ils présentent souvent l’aspect d’une œuvre collective. Ils différaient, selon les sâkâs ou éditions des différentes écoles, selon les charanas ou confréries qui les étudiaient, selon les gotras ou familles qui se les étaient transmis. Effectivement, la science généalogique était un des principaux objets de l’éducation sacerdotale ; toutes les familles de brahmes passaient pour descendre des sept rishis ou patriarches : Bhrigou, Angiras, Wiçwamitra, Vasishtha, Kâsyapa, Atri et Agasti. Elles se subdivisaient en quarante-neuf branches, et ainsi de suite pour chacune de celles-ci. Le mariage était formellement interdit entre ceux qui appartenaient à la même race, qui conservaient le même feu sacré et qui faisaient les mêmes invocations. Toute infraction à cette loi eût semblé un véritable inceste, une abominable profanation.

Les brâhmanas sont importants à examiner pour l’histoire de l’esprit humain ; mais leur valeur littéraire est des plus médiocres : à côté de passages nobles ou judicieux, on y rencontre force bizarreries et force puérilités. Ainsi, prenez le début de l’Aitaréya-Brâhmana, où il est question de l’oblation d’un sacrifice : jamais le mépris de l’idéal et le culte de la formule n’ont été poussés plus loin. Tel geste suffit pour conférer la sainteté ; un certain nombre de vers débités vous procure la santé, la richesse, le bonheur ; quelques syllabes de plus ou de moins (car on les compte) vous ouvrent ou vous ferment le ciel. Il est vrai que l’Ailaréya contient des morceaux plus curieux : par exemple, la légende de Sunahsépha, que nous allons résumer.

Un roi de la race d’Ikshwâkou, Hari-Tchandra, avait cent femmes et pas un fils ; s’adressant à Nârada, sage fameux qui demeurait dans son palais, il lui demanda pourquoi tous les hommes, sensés ou insensés, désiraient tant un fils. À cette question, Nârada répondit par les vers suivants :