Page:Soupé - Études sur la littérature sanscrite.djvu/74

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près de Dehli. Pândou et Dhritarâchtra étaient tous deux fils du poète Vyâsa : le premier eut cinq fils ; le second en eut cent. Pândou céda le trône à son frère puîné, en réservant les droits de ces cinq héritiers, personnages tellement distingués qu’on avait osé attribuer leur naissance à cinq dieux. Mais les enfants de Dhritarâchtra, surtout l’aîné Dourhyôdhana, persécutèrent de toutes façons les Pândavas, qui, après une série interminable d’incidents, de pérégrinations et de combats où dix-huit armées figurèrent, obtinrent la victoire sur la terre et la félicité suprême au ciel. Le souvenir des fils de Pândou s’est conservé, de génération en génération, si vivace et si fidèle, que les habitants de la presqu’île indienne, contrairement à toute hypothèse sérieuse, n’hésitent pas à reporter jusqu’à leur époque et à leur règne les curiosités des grottes d’Éléphanta ou de Salsette, les brillantes sculptures des temples souterrains d’Ellora, et tous ces restes d’un art grandiose et surprenant depuis longtemps évanoui. À l’horizon lointain, dans la pénombre des temps semi-historiques, ces princes apparaissent comme des êtres inférieurs sans doute à Râma, cette incarnation humaine du dieu Wishnou, et comme des créatures mobiles, inégales et pleines de passions, mais dépassant toutefois de bien haut le niveau des têtes vulgaires, comme des types de bravoure, de justice et particulièrement de piété. Ils brillaient au moment où l’âge de fer, l’âge du vice, allait commencer, au moment où la civilisation aryenne penchait vers son déclin, altérée par les effets d’un climat énervant et par le contact des populations étrangères : aussi leurs noms sont-ils mêlés, à chaque instant, aux souvenirs de la littérature brahmanique.

Le conflit de ces Pândavas avec les Courâvas : tel est donc le canevas simple et vraisemblable, qui a reçu les broderies les plus variées et les ornements les plus étranges. Sous cette guerre héroïque et merveilleuse, tout porte à croire qu’il faut reconnaître les vestiges d’une rivalité véritable qui aurait éclaté parmi des races royales, d’un sanglant antagonisme qui aurait origi-