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Page:Souvenirs et Reflexions.pdf/48

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Oui, décidément, l’être intelligent qui tue systématiquement en lui tous les bons instincts et qui, par veulerie, élimine de sa vie tout ce qui pourrait troubler sa douce quiétude — les affections et les devoirs soucieux — celui-là commet le plus affreux suicide moral. Il tombera fatalement dans la basse sensualité surtout à un certain tournant de la vie où l’espoir l’abandonnera, les aspirations que la vie a déçues s’étant envolées une par une. Alors il ne cherchera plus que de brutales satisfactions brèves et positives, après avoir surmonté petit à petit le dégoût qu’elles lui causaient tout d’abord. Oui c’est bien là le suicide définitif.


« Une jolie femme n’a pas besoin d’être intelligente » disent ces messieurs. En effet, pour ce que vous en faites, il suffit d’être pourvue de grâce… et de passivité. Seulement, pauvres créatures ! passé 30 ans vous serez mises au rebut (au 20e siècle, ça pourrait bien aller jusqu’à 40). Conclusion : tâchons, Mesdames, de ne pas être trop bêtes quand nous ne sommes plus belles, mais seulement à partir de ce moment-là.


Une boutade.

Défense aux jolies femmes de se livrer à la prostitution (celles-ci devant se consacrer à la propagation de l’espèce). Ne seront autorisées à embrasser cette profession que les créatures de sexe féminin aussi dépourvues que possible de charme. Un jury composé des plus jolies femmes de la cité procédera à la sélection des susdites. Les affamés de l’autre sexe qui ne peuvent supporter les affres de l’inanition en seront réduits au pot-au-feu conjugal ou à la « bouchée de pain » — mal servie qu’une administration compatissante aura mise à leur disposition. Si cette bouchée de pain leur coupe l’appétit ce sera tant mieux pour tout le monde.

Tant que les lois seront faites par des hommes, mon idée — si excellente soit-elle —, aura peu de chance de succès.


Rien de plus difficile que de conquérir l’esprit d’indépendance… parce qu’il faut prendre son parti du dénigrement des gens moutonniers, lesquels ne vous pardonnent pas les attitudes différant de la leur. Il faut donc se résigner à voir ses actes mal interprétés ; les initiatives seront qualifiées de folies et les abstentions considérées comme un manquement grave aux rites mondains, ceux-ci eussent-ils le caractère le plus tyrannique et ridicule. Il faut vraiment beaucoup de courage pour prendre son parti de déplaire.