Page:Souvestre - Le Monde tel qu’il sera, 1859.djvu/17

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« Votre règne ! s’écrièrent-ils en même temps. Ainsi vous êtes ?… »

Ils cherchaient le nom qu’ils devaient lui donner. Le petit homme glissa gracieusement deux doigts dans la poche de son gilet de cachemire français, en retira une carte lithographiée, et la présenta à Maurice, qui lut :

M. John Progrès, membre de toutes les Sociétés de perfectionnement d’Europe, d’Asie, d’Afrique, d’Amérique, d’Océanie, etc., etc. — Rue de Rivoli.

Maurice et Marthe s’inclinèrent respectueusement. « J’allais visiter les travaux de vos nouveaux chemins de fer, reprit le génie au paletot de caoutchouc, lorsqu’en passant j’ai entendu le souhait de madame Marthe d’abord, puis son appel ; je me suis détourné pour répondre à l’un et pour satisfaire à l’autre.

— Quoi ! s’écria la jeune femme, ce vœu de franchir plusieurs siècles pour se retrouver au milieu du monde perfectionné qui nous est promis ?…

— Je puis l’accomplir, dit le petit dieu en passant avec fatuité sur une de ses joues la pomme de sa canne en fer creux ; dites un mot, et vous vous endormez à l’instant, pour ne vous réveiller tous deux qu’en l’an trois mille. »

Marthe et Maurice se regardèrent émerveillés.

« En l’an trois mille ! répéta celui-ci ; et alors les germes semés par notre époque auront rapporté tous leurs fruits ?

— En l’an trois mille ! et nous nous retrouverons ensemble ? ajouta celle-là, un bras posé sur le bras du jeune homme.