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DE L’ORIGINE ET DE LA NATURE DES AFFECTIONS

penser ? Quand le Corps est au repos dans le sommeil, l’Âme en effet reste endormie avec lui et n’a pas le pouvoir de penser comme pendant la veille. Tous savent aussi par expérience, à ce que je crois, que l’Âme n’est pas toujours également apte à penser sur un même sujet, et qu’en proportion de l’aptitude du Corps à se prêter au réveil de l’image de tel ou tel objet, l’Âme est aussi plus apte à considérer tel ou tel objet. Dira-t-on qu’il est impossible de tirer des seules lois de la nature, considérée seulement en tant que corporelle, les causes des édifices, des peintures et des choses de cette sorte qui se font par le seul art de l’homme, et que le Corps humain, s’il n’était déterminé et conduit par l’Âme, n’aurait pas le pouvoir d’édifier un temple ? J’ai déjà montré qu’on ne sait pas ce que peut le Corps ou ce qui se peut tirer de la seule considération de sa nature propre et que, très souvent, l’expérience oblige à le reconnaître, les seules lois de la Nature peuvent faire ce qu’on n’eût jamais cru possible sans la direction de l’Âme ; telles sont les actions des somnambules