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notice sur l’éthique

la lecture de l’Éthique et l’influence de Spinoza eût pu s’exercer plus tôt dans un cercle plus étendu[1].

Tout persuadé que je suis de sa bienfaisance, je me demande s’il faut beaucoup regretter que cette introduction et cette explication n’aient pas été jointes à l’Éthique par son auteur. Le Traité de la Réforme de l’Entendement et les Lettres fournissent, je crois, aux personnes vraiment curieuses de sa pensée les éclaircissements désirables, et il n’a pas écrit, cela est certain, pour ceux qui plaignent leur peine.

Les lignes par lesquelles se termine l’Éthique pourraient, en changeant quelques mots, servir d’avertissement au lecteur : « Si la voie que j’ai montrée, qui conduit au vrai contentement, paraît être extrêmement ardue, encore y peut-on entrer. Et cela certes doit être ardu qui est trouvé si rarement. Comment serait-il

  1. C’est à travers les penseurs allemands du xviiie siècle ou au moins de sa dernière moitié, que le spinozisme a été vu pendant presque tout le xixe siècle : Lessing et Jacobi, Herder, Goethe, ont fait assurément beaucoup pour sa popularité, et l’on peut dire que par eux il est devenu notoirement une des grandes époques de l’histoire générale de l’esprit (voir, sur ce point, Delbos : le Problème moral dans la philosophie de Spinoza, et un article de M. Andler dans la Revue de Métaphysique et de Morale, 1895). Il ne faut pas oublier cependant que l’Éthique a eu des lecteurs et des admirateurs fervents dans les Pays-Bas et même en France dès le xviie siècle et pendant une partie au moins du xviiie. L’histoire du spinozisme en France, en particulier, n’a pas encore été écrite et rien ne prouve qu’elle ne vaille pas la peine de l’être. (L’étude, intéressante d’ailleurs, de M. Paul Janet dans les Maîtres de la Pensée Moderne, Paris, 1887, est par trop insuffisante et incomplète.) Il faut souhaiter que la publication récente, par M. Colonna d’Istria, de la traduction de l’Éthique, restée si longtemps manuscrite, du comte de Boulainvilliers, attire de ce côté l’attention de quelque historien des idées.